Première ascension du sommet nord-ouest du Saraghrar (7 300 m)
©Archil Badriashvili/American Alpine Journal
Saraghrar, sommet nord-ouest, première ascension par la face nord-ouest, 2 300 m, ED2 6B
(cotation russe), 6b M5+ A3+ 80-90°, du 3 au 10 septembre 2021. Descente dans la voie
avec un bivouac supplémentaire.
Le Saraghrar se situe dans le très peu fréquenté massif de l’Hindou Kouch pakistanais, juste au sud de la frontière afghane. Il est constitué de plusieurs sommets, mais peu de grimpeurs les ont atteints. Le sommet nord-ouest du Saraghrar (7 300 m) n'avait jamais été gravi, malgré des tentatives poussées sur le contrefort sud-ouest par trois fortes expéditions espagnoles dans les années 1970 et au début des années 1980. La dernière de ces expéditions avait atteint environ 7 150 m sur l'arête nord-ouest, un point nommé Saraghrar, sommet nord-ouest II. Les Géorgiens Archil Badriashvili, Baqar Gelashvili et Giorgi Tepnadze ont choisi la face nord-ouest, qui n'avait pas encore été tentée et dont la partie supérieure est constituée d’une raide paroi rocheuse rejoignant l'arête nord-ouest. Ils ont également choisi le mois de septembre, plus tard dans l'année qu’habituellement, afin de réduire la chaleur diurne et ainsi le risque de chutes de pierres.
À partir d'un camp de base situé à environ 4 200 m dans le Rosh Gol, et avec une pré-acclimatation réduite, les trois hommes se sont « échauffés » en effectuant la première ascension de la face sud et de l'arête est (1 800 m, TD, 60° en glace, 75° en neige) du Languta-e-Barfi (6 833 m), avec un bivouac à 6 400 m. C'était la quatrième ascension de ce sommet, surnommé par les locaux « La fiancée de l’Hindou Kouch », mais la première depuis le Pakistan.
Neuf jours plus tard, le 3 septembre, les Géorgiens entament l'ascension de la face nord-ouest du Saraghrar à environ 5 000 m. Décordés, ils remontent d’abord l'énorme couloir de neige et de glace qui caractérise sa moitié inférieure, pour atteindre un premier bivouac à 6 200 m. Au-dessus, une raide paroi granitique constitue le passage-clé de l'itinéraire. Surmontant d’importantes difficultés en escalade mixte, libre et artificielle, ils bivouaquent à 6 400 m, 6 600 m, 6 750 m, 6 850 m et à environ 7 000 m au sommet de la face. Les jours 5 et 6 sont consacrés au difficile et vertical Headwall de 250 m, dont une seule longueur leur demande sept heures d’effort.
À la sortie de la paroi s'étend une longue et complexe arête cornichée de 300 m de dénivelé. Les trois Géorgiens posent leur dernier bivouac près du point le plus haut atteint par les Espagnols, et le huitième jour, ils atteignent enfin le sommet. Le même jour, ils redescendent jusqu'à leur bivouac au-dessus du Headwall. Le lendemain matin, ils entament la descente de la face nord-ouest par 35 rappels, continuant toute la nuit jusqu'à son pied.
Le jury a estimé que le choix d'un haut sommet vierge dans une région peu connue, avec une approche by fair means, une face jamais tentée auparavant, une petite équipe, une longue ascension de neuf jours dans un pur style alpin avec des difficultés techniques importantes au-dessus de 6 200 m, un passage-clé entre 6 750 m et 7 000 m et un haut niveau d'engagement, illustraient bien la Charte des Piolets d'Or.